BOUSAMTACH
Mot bizarre ? Ok!
Compose de BOUkara, un bout de SAMarkande et du début de TACHkent. Je me facilite la tache en parlant des trois en même temps car l'impression que j ai eue c’est qu’il s’agissait du même combat. Toutes trois se trouvent sur la route de la soie. Si Tachkent en est la capitale actuelle par la volonté des Russes, les deux autres villes l’avaient été aussi auparavant.
Partout on entend parler des mêmes notions, à savoir : Mosquées, madrassas, mausolées, palais, tous à l'initiative de personnages importants, plus ou moins connus, tous disparus depuis des siècles ou de plus d’un millénaire. Grands conquérants et constructeurs dans leurs villes et dans d’autres aussi.
Autre point commun: les termes de rénovation et de restauration sonnent comme un sempiternel refrain, une rengaine, une scie, dans les rapports des guides.
Au contraire de la destination finale des dits monuments : il n’y en a pas. On érige un monument et après n’importe quel ayant-droit : descendant direct ou pas, exceptionnellement membre féminin ou encore nouveau conquérant, peut en faire n’importe quoi, ou presque, a son gré. En général, tout est susceptible de devenir autre chose : mosquée, madrassa, mausolée, lieu d’ablutions, hammam, palais, harem, bibliothèque et ... boutiques. Derniers avatars depuis peu et le développement du tourisme : beaucoup de ces monuments deviennent hôtels, restaurants ou musées.
Non, en vrai, c’est le fait de civilisation perenne indissociable de la Mosquée, où mosquée = espace de vie et d’échanges de toutes sortes, terrestres et spirituels, littéraires et scientifiques, entre gens remplis ou non de piété, quelle quelle soit. Pas du tout l’équivalent de nos places publiques qui ne sont vraiment vivantes que lors de manifestations diverses et variées, sans la piété.
Mais parfois aussi espace de mort car ces lieux servaient aussi aux exécutions capitales.
Bien entendu, avant d’en faire ce qu’on veut, de ces monuments, il faut d'abord les concevoir puis les bâtir. No problème : on est Imam ou Sultan ou Grand Conquérant et on a les moyens pris sur fonds propres, ou après conquêtes, ou hérités. On va chercher les personnes compétentes partout dans le monde connu et on leur explique gentiment, après promesses de monts et merveilles mais fermement : « vous avez carte blanche mais voila ce que je veux. Et je passerai voir de temps en
temps avant daller vaquer à mes occupations habituelles » : la gouvernance avec ou sans massacres. Sur ce dernier point, pour remplir les caisses, si le cheminement client-marchand-état (les impôts) ou négoce international simple ne suffisaient pas, on allait demander aux voisins leurs valeurs et autres matières premières, plus ou moins gentiment, cela dépendait de leur niveau de résistance armée.
Et pendant ce temps, les savants récoltés se mettaient au boulot pour réussir à réaliser ce qui leur avait été commandé. De véritables défis techniques pour l’époque.
Et ces gens la, en confrontant leurs idées, leurs connaissances et leurs capacités créatrices ont accompli des prouesses, trouvé de nouvelles notions, inventé de nouvelles techniques. Je n’en citerai qu’une : ils ont résolu l’épineux problème de la quadrature du cercle à grands coups de stalactites. Qui dit mieux ?A ce propos, recherchez « muqarnas ». sur internet...
Ou encore, dans un cas, parce le client n’était pas content de la hauteur ET du diamètre du dôme et que, franchement, on n’allait pas passer dix ans ou plus à tout casser et tout refaire. Le point d'achoppement vient du fait que la construction et la décoration sont réalisés de façon concomitante : le décorateur suit le bâtisseur au fur et à mesure de l'avancement des travaux : tu montes d'un mètre, je monte d’un mètre aussi, juste derrière toi. Et là, tout était fait, décoration du dôme comprise.
Il a donc fallu tricher, je veux dire innover, faire preuve de créativité, trouver de nouvelles techniques. II manque 20 mètres là-haut ? Qu’à cela ne tienne ! Pas question de démolir le dôme, on va les gagner par en dessous: il suffit de creuser pour découvrir quelques mètres de fondations (pas les 20) et d'égaliser le sol autour. Le dôme n’est pas assez large pour Monsieur ? Qu’à cela ne tienne ! Je t’en remets une deuxième couche par dessus, comme un couvercle.
Et la, je pense qu’il est heureux pour tous ces savants et artistes que le client soit décédé avant d’avoir pu contempler l’œuvre. Lequel client a été le premier bénéficiaire de ce mausolée qu’il destinait à son petit-fils qui y a eu droit à son tour, mais avant la grand-mère qui l’en avait finalement fait bénéficier.
Les mausolées sont les constructions qui ont le moins souvent changé de destination. Le truc ? Y faire ensevelir un chamane, un saint homme dont la tombe est agrémentée d'un mat dont le sommet comporte une sorte de potence indiquant la direction de la Mecque. Même les conquérants les plus brutaux, ignares et iconoclastes, pourtant prompts à raser ce qui était là avant qu’ils n’arrivent, reculaient devant les conséquences qu’un tel acte irréfléchi pourrait provoquer.
Une petite extrapolation.
Les muezzins. Je les soupçonne d’avoir suborné les architectes pour les inciter à raboter le monument et le minaret qui va avec parce qu’ils se voyaient mal grimper les 60 mètres cinq fois par jour pour l'appel des fidèles à la prière.
Ça aurait posé moins de problèmes de nos jours avec les haut-parleurs et la programmation possible des appels. La question : que font-ils de tout ce temps gagné ?
Et nous dans tout ça ? Nous qui arrivons la tête remplie d’images toutes faites venues en droite ligne de films, de romans … nous attendons de voir Gengis Khan, Timour et autres conquérants, nous entendons le bruit des cavalcades, le fracas des armes, les chameaux qui blatèrent, les chiens qui aboient et les caravanes qui passent à chaque fois que les guides évoquaient le passé pour expliquer le présent. Nous, nous nous sentons un peu prisonniers de cette route de la soie nouvelle formule qui se résume à une bande de goudron parfois émaillée de villes nouvelles et modernes, comportant tout de même de nombreux et superbes vestiges du passé découverts et restaurés sans compter ceux à découvrir (des fouilles archéologiques à venir sont visibles un peu partout)
Si déception il y a eu de la part de quelques esprits chagrins, elle a vite été balayée par la beauté des rencontres aussi bien paysagères (c'est beau le désert !) qu’humaines. Je fais, là, référence à la gentillesse des personnes rencontrées : nos guides d'appoint, les chauffeurs et les marchands rencontrés. Tous ont fait preuve d’une patience infinie malgré leur profond désir de nous arnaquer face à notre volonté de ne pas l’être malgré une fièvre acheteuse avérée. Mention spéciale pour notre guide préférée, Laziza qui, la malheureuse, a été en contact permanent avec nous.
ZALAN
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